Compte rendu d’une horizontale d’un grand millésime de Bordeaux. Le compte rendu sur le lien suivant:
Le lundi 12 novembre 2001.
Synthèse des commentaires de dégustation : Pierre Citerne.
Quelques commentaires de contexte :
Les vins ne sont pas dégustés à l’aveugle, ils ont été carafés
Nombre de dégustateurs : une douzaine
PP : Pascal Perez – DS : Didier Sanchez – LG : Laurent Gibet – PC : Pierre Citerne
1. Pomerol : Château Gazin 90
DS : 16,5 – LG : 16,5 – PP : 17 – PC : 16/16,5. Note moyenne : 16,6 – Prix : 490F
Robe profonde, centre grenat noir, bordure orangée.
Le nez aussi est profond, surtout à l’aération : puissant bouquet concentré et complexe, des notes de fourrure, d’herbes sèches, de noix grillée, de quinquina…
Attaque souple et moelleuse, retour des tannins en finale ; un vin concentré et élégant, svelte.
2. Pomerol : Château Lafleur-Petrus 90
DS : 16 – LG : 16 – PP : 16 – PC : 15,5. Note moyenne : 15,9 – Prix : 590F
Robe brillante moins dense que la précédente, reflets acajou.
Nez subtil : fraise des bois, nette inflexion organique (viscères de poulet), menthe séchée (qui augmente à l’aération jusqu’à donner un caractère cadurcien) ; globalement un bouquet plutôt timide, qu’il “faut aller chercher”.
Matière sapide (saveurs distinguées de café grillé et de cassis), souple et délicate, longue et précise mais souffrant d’une certaine minceur en milieu de bouche.
3. Saint-Emilion : Château Belair 90
DS : 15 vers 14,5 – LG : 15 – PP : 15 – PC : 15,5. Note moyenne : 15,1 – Prix : 420F
Bouche structurée, qui ne semble ni très mûre, ni exubérante ; un ensemble cohérent, droit, mais assez mince.
4. Haut-Médoc Cru Bourgeois : Château Sociando-Mallet 90
DS : 16,5 – LG : 16,5 vers 17 – PP : 16,5 – PC : 16,5. Note moyenne : 16,6 – Prix : 380F
5. Pauillac Cinquième Cru Classé : Château Lynch-Bages 90
DS : 17,5 – LG : 17,5 – PP : 17,5 – PC : 17. Note moyenne : 17,4 – Prix : 590 F
6. Saint-Julien Troisième Cru Classé : Château Lagrange 90
DS : 15,5 – LG : 15,5 – PP : 16 – PC : 15,5. Note moyenne : 15,6 – Prix : 450F
Robe dense, bords grenat.
Beau nez classique, riche fruit de cabernet médocain oscillant entre cassis et “poivron noble”, escortés des notes grillées et crémeuses conférées par un élevage marqué.
Attaque ample et sapide, cette sérénité se désunit en fin de bouche, où l’on sent un manque de tension, d’acidité, ainsi qu’un retour un peu agressif de l’alcool et des tannins moins fins et intégrés que ceux des autres vins.
7. Saint-Estèphe Deuxième Cru Classé : Château Cos d’Estournel 90
DS : 17,5 – LG : 17 – PP : 17 – PC : 17,5. Note moyenne : 17,25 – Prix : 650F
Robe dense et profonde, d’une couleur grenat solaire assez évoluée.
Expression aromatique de grande amplitude et de grande séduction, un fruit moelleux, très mûr (avec des accents presque iodés), des notes torréfiées conférées par un boisé présent mais de grande classe. Ce nez pourrait paraître facile, mais il dégage une telle impression de race et de cohérence, qu’on oublie de le juger racoleur.
Soyeux, sapide en bouche, beaucoup de chair (merlot ?) et de profondeur, merveilleuse finesse de grain en deuxième partie de bouche, sans aucune lourdeur malgré son caractère opulent et souple.
8. Saint-Julien Deuxième Cru Classé : Château Léoville Las Cases 90
DS : 16 – LG : 16 – PP : 16,5 – PC : 16/16,5. Note moyenne : 16,2 – Prix : 890 F
Robe curieusement un peu moins dense que les autres médocs, reflets orangés.
L’expression du cabernet frôle la surmaturité, avec un caractère confit et iodé, des notes puissantes mais peu harmonieuses de nuoc-mâm, de viandox, de vieille chaussure en cuir… A l’aération le bouquet s’épure considérablement, redevient beaucoup plus classique.
Matière concentrée, très mûre, mais qui semble manquer de gras, la finale se montre étonnamment désunie, presque agressive ; là encore le vin s’améliore nettement à l’aération. S’il retrouve une certaine sérénité en fin de dégustation, Las Cases reste difficile à juger malgré ses indéniables qualités de volume et de structure.
Premier enseignement par rapport à la réputation du millésime 1990 : les vins paraissent effectivement très mûrs (sauf peut-être Belair), parfois même surmûrs, mais n’accusent aucune lourdeur – leur équilibre “classique” est remarquable.
Racés et ouverts, ces bordeaux se boivent à l’heure actuelle avec beaucoup de plaisir, ils semblent prêts, à l’exception peut-être de Sociando-Mallet ; comment vieilliront-ils ?
La Rive Gauche a davantage impressionné et séduit que la Rive Droite ; il faut remarquer que les forces en présence n’étaient pas vraiment comparables avant d’en tirer des conclusions générales.